#cemondeenmarchedocumentaire

Bernard Ronot, le véritable métier de « paysan »

Traverser la France, c’est ce qu’on a fait pour rencontrer une personnalité déjà connue et reconnue dans le milieu des idées alternatives : Bernard Ronot, ancien agriculteur biologique à Chazeuil près de Dijon. Bernard Ronot inspire la réflexion pure sur la durabilité des choses. Il est de ceux que l’on écoute, tel un vieux sage qui a su, et qui sait qu’il ne saura jamais tout. Avec lui, on ne parle pas que d’agriculture ! Comme beaucoup de gens que nous avons rencontré, M. Ronot ne s’en tient pas aux problèmes de l’agriculture actuelle.

L’homme nous donne une vision globale d’un monde en déroute. Pour autant, il n’y a pas dans sa voix d’accents pessimistes ou amers. Bien au contraire, l’on entend des piques, de belles formules, et l’expression de quelques joies et déceptions d’une vie. Les mots sont graves, lourds dans la bouche de notre interlocuteur, qui n’hésite pas à pointer du doigt la perte d’autonomie des agriculteurs, la perte de connexion entre le sol, la semence, et l’agriculteur. Et il sait de quoi il parle car il a vu l’agriculture changer depuis la seconde guerre mondiale, jusqu’à ce qu’elle change trop, il en était.

« A 55 ans, j’ai véritablement compris ce qu’était mon rôle de paysan, c’était de nourrir le monde, et de le faire de la meilleure manière possible ».

S’engageant alors dans la réflexion d’une vie, il entreprend avec sa femme la conversion de sa ferme à l’agriculture biologique. Son fils reviendra d’ailleurs à la ferme voyant qu’une autre agriculture était possible. Après la conversion, il entreprend des démarches pour pouvoir cultiver d’anciennes variétés de blés. Mais les semenciers lui fermeront leurs portes. C’est là que va naître l’association graine de Noé, qu’il a fondé et un temps présidé, avant de laisser la barre à Stéphanie Parisot.

« Aujourd’hui, toutes les variétés que nous cultivons sur notre plateforme de sélection n’apparaissent plus au catalogue officiel du ministère de l’agriculture ».

Bernard Ronot a compris très tôt l’importance capitale des variétés anciennes, et l’intérêt de la diversité génétique de chaque variété. Déplorant l’uniformité des cultures actuelles de blé (une seule variété dans chaque parcelle), il rappelle que le mélange des variétés dans une même parcelle offre de nombreux avantages : lutte naturelle contre les insectes, lutte contre la verse etc.

« Il y a deux modèles : l’agro-industrie a poussé le modèle de la standardisation à son extrême, on a un champ de blé qui pousse certes bien, mais avec une seule variétés qui demandent des traitements constants coûteux pour le portefeuille et pour l’environnement. Ou alors on revient 40 ans en arrière, et on redécouvre les avantages et inconvénients de chaque variétés en essayant d’associer les bonnes pour un rendu optimum ».

Ayant à cœur de protéger cette diversité naturelle des blés anciens, l’association Graines de Noé a été fondée dans le but de collectionner, cultiver et multiplier les anciennes variétés de blés, de sensibiliser le grand public à la diversité des produits végétaux, leurs goûts, leurs formes, leurs couleurs et leurs usages mais aussi de diffuser les semences.

Selon Bernard Ronot, le changement vient, il arrive petit à petit, conscience après conscience. Et c’est une très bonne nouvelle. 

Billets d'humeurs

 

André Pochon, le soldat de l'herbe

Quand on se lance dans un projet tel que #cemondeenmarchedocumentaire, on se pose toujours des questions. Encore plus quand on écrit une lettre à André Pochon, aperçu dans tant de films documentaires de renom (rien que « vu du ciel » de Yann Arthus Bertrand !). Que va-t-il répondre ? Oui, non, peut-être ? La réponse à ma lettre ne s’est pas fait attendre, j’avais un message sur ma boîte vocale le soir même où elle lui avait été délivrée par le facteur. Un message très positif.

André Pochon, agriculteur à la retraite, est un des premiers représentants Français de l'agriculture durable. Amoureux de la littérature française, et passionné d’histoire contemporaine, ce paysan érudit me récite entièrement l’expiation de Victor Hugo qu’il a appris adolescent. Etonnant et attachant, du haut de ses 83 ans, André Pochon garde cet esprit vif, doué de raison, de clairvoyance, cet air "malin". Il est le témoin d’un passé qui n’est pas forcément celui auquel on pense de prime abord.

André Pochon est de ces gens sans langue de bois, qui savent ce qui importe et ce qui est superflu. Ce qui l’anime encore et plus que tout à son âge, c’est la volonté de transmettre. « Dédé » Pochon comme il aime à s’appeler ainsi, est un formidable conteur qui vous fait comprendre en quelques heures les écueils de la société d’aujourd’hui. Ses constats ne peuvent laisser indifférents, et ses prises de positions non plus. Content et fier de déranger certains, le personnage est toujours debout, prêt à continuer le combat, pour une agriculture durable productive – et non productiviste !

Né en 1931, André Pochon est de cette génération qui a vu tout changer : les rapports humains, la façon de travailler la terre, la relation aux animaux, l’ère de la mécanisation, et aujourd’hui de la robotisation croissante. Adolescent, il est vite remarqué par ses professeurs qui le poussent à continuer ses études. Une fois marié, il reprendra avec sa femme une petite exploitation des côtes d’Armor, qu’ils feront fructifier petit à petit. En 1982, avec des voisins agriculteurs, il co-fonde le CEDAPA – centre d’étude pour un développement agricole plus autonome. Décoré à de nombreuses reprises, il recevra en 2001 la légion d’honneur pour son rôle de pionnier dans l'agriculture durable et écologique. Il n’aura de cesse de faire découvrir la « méthode Pochon » : basée sur la remise en valeur de l’herbage et son utilisation écologiquement intensive. Oxymore me direz-vous ? Eh bien non, loin de là. L’intensif n’est qu’un adjectif, pas une tare. C’est une méthode, des processus, pas un résultat. En supprimant l’azote des intrants de ses pâtures, André Pochon remarque que ses prairies tiennent beaucoup mieux la sécheresse et verdoient beaucoup plus que celles de ses voisins. C’est le point de départ d’une longue et continuelle réflexion. Parce que c’était « économique, cela s’est imposé à mes yeux, les aspects écologiques, on n’en parlait pas encore ».

Sa méthode, si elle présente de nombreux avantages économiques et écologiques n’est pas l’essentiel. Il n’y a pas que la « méthode Pochon », il y a l’homme et son parcours : ses erreurs, son apprentissage, ses réussites. C’est ce qui m’intéressait et que je trouvais essentiel de relater dans le documentaire. Deux rendez-vous auront été nécessaires pour recueillir un témoignage de presque cinq heures.

Au moment de se quitter, André Pochon me rappelle : « il faut continuer le combat ». Continuons-le !

 

 

‪#‎cemondeenmarchedocumentaire‬


Ce samedi, nous avons été à la rencontre de Sylvaine et Grégory, propriétaires du jardin "La pâture es chênes" près de Saint-Brieuc, jardin où sont mises en oeuvre la permaculture, les techniques du sol vivant et l'agro-écologie. En attendant le petit debrief de l'interview sur notre site Internet, vous pouvez visiter leur page Facebook :

https://www.facebook.com/lapatureeschenes?fref=ts

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